Aujourd’hui plus de 20 ans nous séparent du Manifeste Agile où dix sept experts issus du monde informatique ont formalisé les concepts, les valeurs de l’agilité.

Ces concepts ont évolué vers la rationalisation et la diffusion dans toute l’entreprise, et ont eu un impact fort sur la manière d’appréhender le travail dans le domaine du numérique, dans les états d’esprit comme sur la technologie intégrant de plus en plus le “tout numérique”..

L’agilité à l’échelle est devenue le terrain de prédilection de beaucoup d’organisations face à un accroissement de l’incertitude et un environnement de plus en plus complexe, changeant, ambigu et incertain.

 

Agilité à l’échelle, face au VUCA de l’entreprise

Nous ne faisons plus, que, de l’agilité au niveau de l’informatique, mais, de l’agilité à tous les niveaux de l’entreprise en intégrant des pratiques collaboratives de co-construction qui se diffusent jusqu’aux clients, des outils d’automatisation pour produire, répondre, analyser … plus vite comme les outils Big Data, machine learning,  DEVOPS ou Intelligence Artificielle (IA) avec sa forte capacité d’analyse qui nous ouvre des champs d’exploration nouveaux…

Nous mettons en place des cadres de travail comme Scum, SAFe, ou Less par exemple, pour coordonner et aider les équipes dans leur compréhension, leur fonctionnement, et leur coordination.

Ils partent tous des directions informatiques pour diffuser des pratiques vers l’ensemble des métiers de l’entreprise, créant souvent une révolution de fonctionnement au sein de l’organisation. Elle déstabilise le management ayant souvent des difficultés à retrouver sa place. Elle occulte souvent des process généraux de l’entreprise faisant perdre des niveaux de sécurité. Elle engendre des risques importants, des salariés en surcharge d’activités allant jusqu’au burn-out, sans compter un accroissement significatif des coûts.

D’autres pistes existent encore pour aborder l’agilité à l’échelle comme Disciplined Agile du PMI favorisant plutôt qu’un framework établi, un kit outils pour co-construire son mode de travail avec les équipes des différents domaines d’activités de l’entreprise en fonction des maturités (choix des pratiques agile les mieux adaptées à l’équipe), un cycle de vie produit répondant aux nécessités de livraison, une entreprise de bout en bout mettant en place son agilité par sa maturité et non par des injonctions générales.

Alors quel apport pour l’entreprise ? L’adaptation au marché avec une meilleure compréhension des demandes avec une réduction des écarts entre l’offre et la demande, une meilleure réactivité au vu de la volatilité des besoins, un lissage des aléas potentiels par anticipation… Une réponse à l’enjeu de survie et de positionnement dans ce monde VUCA.

Par exemple, on voit maintenant dans l’industrie 4.0 la recherche à produire en grande série des produits qui seront adaptés spécifiquement, des usines connectées avec des outils de production communicants fournissant des données analysées en temps réel facilitant la prise de décision réduisant ainsi le temps de délivrance de la valeur du produit au client, avec des équipes agiles qui s’ajustent et recherchent continuellement l’amélioration continue pour la délivrance de la plus forte valeur au client (le MBI* de Disciplined Agile).

L’humain contribue alors à l’agilité avec la mise en place d’un nouvel état d’esprit qui demande l’implication, la responsabilisation, l’innovation  à tous les niveaux.

Le leadership est prôné, et le management assoupli pour donner de l’autonomie au groupe et spécifiquement aux individus. La multicompétence devient une clé de succès des groupes évitant des flux de travaux discontinus. La notion d’un métier / un poste devient obsolète ; on parlera plutôt d’un métier lié à une convention, et de rôle exercé à un instant T.

 

L’humain facteur d’agilité plus que la technologie ?

Les mads skills deviennent un indice de l’agilité humaine en management des ressources : elles permettent d’identifier le dynamisme, l’implication et donc le leadership en plus des softs skills remplacés au final par les hards skills, considérant que les softs skills peuvent toujours s’acquérir contrairement aux hards skills.

L’organisation devient plus apprenante, donc plus réactive, par le partage et l’intelligence émotionnelle de chaque membre qui la compose, le travail plus mobile, plus collaboratif et plus ouvert dans un monde de plus en plus interconnecté et rapide.

Nos métiers pour pouvoir pleinement profiter des bénéfices de l’agilité devraient être repensés vers ces nouveaux rôles plus structurés en termes de savoir être avec l’appui des directions des richesses humaines et des managers servant-leader pour le développement des savoir-faire et savoir s’organiser. Les conventions de branche régissant les métiers et les salaires en sont donc impactés et devraient évoluer pour aider ce changement, mais cela prendra du temps. Nous l’avons vu, l’agilité porte une forte dimension collective et existe au-delà des règles et des outils par la puissance de l’intelligence de l’humain.

Une autre piste : le développement du tout numérique et les possibilités annoncées de l’intelligence artificielle (IA) se mettront-elles au service de l’intelligence humaine ou au service de la procédure ? L’agilité en serait-elle décuplée ou freinée ?

 

Intelligence artificielle au service de l’agilité ?

Sur ce sujet deux approches existent. Certains considèrent que l’IA a pour vocation de transmettre le savoir-faire à la machine, et, ainsi, lui donner le pouvoir du savoir permettant d’être moins dépendant des “experts”.

D’autres considèrent l’IA comme allégeant le “faire”, les sujets exécutables, prévisibles en tout ou partie par la mesure des expérimentations passées. L’IA est un outil permettant d’alléger l’humain du connu pour développer son temps de réflexions et sa capacité à s’adapter à l’inconnu.

Est ce que ces deux approches s’affronteront ou cohabiteront ?

La volatilité des besoins, les incertitudes et complexité des environnements, évoqués plusieurs fois rendent les prévisions aléatoires, voire inappropriées. D’autant que l’Homme n’est pas “un” mais multiple; de cultures, d’histoires et de sensibilité différentes.

 

Souhaitons que la raison, l’éthique et le bon sens y trouvent leurs places

Que l’intelligence artificielle et l’intelligence humaine servent à co-construire un environnement dans lequel l’agilité est avant tout un équilibre entre procédure et discernement.

Que les capacités individuelles de répondre à la multi compétence, l’autonomie et la responsabilisation, sans compter la capacité de leadership soient utilisées à bon escient.

Que la capacité culturelle d’intégrer ces nouveaux modes de travail en faisant fi d’une culture de command control depuis l’ère du Taylorisme soit développée si nous voulons vraiment un futur agile dans le monde du travail.

Auteurs :

Claudine Blanquier – Coach en transformation des organisations vers plus d’agilité

Catherine Richard-Contremoulins – Directrice Services Clients chez SPI – Septeo Pôle Immobilier

(*) MBI, minimum business increment de Disciplined Agile, le plus petit morceau de valeur libérable qui a du sens d’un point de vue commerciale

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