Durant l’ère industrielle, l’Europe était le centre de gravité de l’innovation, mais récemment, elle a largement perdu son avantage vis-à-vis des États-Unis et de la Chine, prenant du retard dans les secteurs en croissance et dans les domaines d’innovation tels que l’intelligence artificielle, la biotechnologie et le spatial. L’innovation ne peut être un succès sans innovateurs sauf qu’aujourd’hui, les talents créateurs de la valeur s’expatrient en masse, faute de trouver des remplaçants, l’innovation tant attendue risque de ne pas se concrétiser.

Le cas particulier de l’expatriation aux États-Unis mérite toute notre attention puisque l’écosystème américain a la réputation d’être le meilleur du monde et celui qui attire les meilleurs talents en leur promettant prospérité et perspectives.

On se demande alors comment peut-on retenir nos talents ? Pour répondre à cette interrogation, il est nécessaire de se poser les questions suivantes : qui sont ces expatriés ? Pourquoi sont-ils partis ?

Le talent européen en quête de sens

En 2014, 94 % des talents français étaient désireux de s’expatrier, ce chiffre est descendu à 69 % en 2018. Toutefois, malgré cette tendance à la baisse, les talents français sont plus enclins à l’expatriation que la moyenne mondiale (57 %). C’est ce que révèle une enquête mondiale menée par le cabinet BCG (http://media-publications.bcg.com/france/Etude-France-Global-Talent.pdf). Parmi les destinations les plus prisées par les talents français, figure la Suisse, le Canada suivis par les États-Unis. À l’échelle mondiale, l’enquête place les Etats-Unis comme le pays le plus attractif, suivis par l’Allemagne et le Canada. La France se place à la 7e position derrière l’Australie, le Royaume-Uni et l’Espagne. On peut déduire de ces chiffres que les régions les plus attractives sont l’Amérique du Nord et l’Europe de l’Ouest. Les répondants français de l’enquête ont affirmé leurs exigences en terme de valeurs que véhiculent l’entreprise ainsi que la mission qu’elle porte, l’équilibre vie privée/professionnelle, le sens, le bien-être et les expériences diverses sont autant de critères importants. 

Qu’en est-il des superstars ?

 

Au-delà de l’aspect quantitatif et des statistiques qui montrent un équilibre entre l’Europe et les États-Unis en termes d’attractivité de talents, l’aspect qualitatif, quant à lui, dresse un bilan plus déséquilibré. L’institut Montaigne a publié en 2010 un rapport détaillé sur la perte du capital intellectuel français. Dans le domaine médical, depuis la Seconde Guerre mondiale, cinq prix Nobel ont été attribués à des scientifiques français dont deux qui travaillaient aux États-Unis. Le monde de la composition n’a pas échappé à la règle avec l’exode de compositeurs de renommées. En économie, l’étude montre que sur les 1 000 meilleurs économistes dans le monde, on dénombre 41 chercheurs français : 25 en France et 16 aux États-Unis. Par ailleurs, sur les 100 meilleurs économistes dans le monde, indiquent les auteurs, 6 sont français (4 travaillent aux États-Unis). Le tableau ci-après représente un classement des meilleurs économistes mondiaux, fondé sur le nombre de publications parues entre 1990 et 2000, pondéré par le nombre de coauteurs et l’importance de la revue.

Nous avons déjà évoqué (dans un article NXU) les raisons de ces départs dûs en grande partie à l’écosystème d’innovation. Les expatriés trouvent aux États-Unis un cadre de travail idéal avec de meilleures conditions qu’en Europe. Les salaires sont relativement élevés avec des procédures de recrutements optimales (moins d’administratif). La majorité des scientifiques français interrogés dans le cadre de cette étude nexcluent pas de rentrer en France sauf que les motifs invoqués pour cela sont rarement dordre professionnel (plutôt familial ou personnel).

Dans le domaine de L’Intelligence Artificielle, plusieurs talents français et européens ont apparemment été séduits par l’écosystème américain. On peut citer quelques-uns : Yann LeCun (Facebook), Jérôme Pesenti (Facebook), Luc Julia (Apple), Emmanuel Mogenet (Google, Facebook).

Le cas Netflix

 

Avec 167 millions d’abonnés et 190 milliards de dollars de valeur en bourse, Netflix est incontestablement un géant de la Tech. Sa réussite a été si fulgurante grâce à l’Intelligence Artificielle et aux algorithmes de recommandations qui facilitent le choix et la prise de décision pour ses millions d’abonnées. Netflix est aujourd’hui connu par son management exceptionnel et notamment sa gestion des talents hors norme. La politique de Netflix est articulée autour de plusieurs axes : 

  • d’abord, Netflix propose un environnement propice à l’innovation avec peu de règles, notamment avec l’élimination des procédures administratives et une liberté totale aux salariés. Une culture du Feed-back direct entre salariés et managers (dans les deux sens).
  • un management de contexte, les managers intermédiaires peuvent prendre de grandes décisions avec de gros budgets sans demander la permission.
  • des salaires faramineux qui sont à la hauteur des compétences et de l’expertise des talents.
  • le remplacement des éléments non-essentiels se fait rapidement avec un gros turnover. Les talentueux, qui ne sont plus à jour dans leur compétences, sont virés.

Cet environnement, très challengeant et rude pour certains, engendre l’innovation, l’agilité et la flexibilité. On pense que les géants comme NETFLIX et les GAFAM ne peuvent voir le jour et prospérer sans un écosystème flexible et propice à leur conception et leur développement.

Auteur : David Jaidan – membre NXU Think Tank – AI Expert | Entrepreneur | Adding Real-World Insights using AI Tech to Internal Decision-Making Process.

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