Définition de l’intelligence selon NXU
Intelligence Artificielle : c’est en partant des usages qui sont faits de ces deux termes, apposés pour la première fois par John McCarthy en 1956, que nous avons voulu construire une définition inclusive de l’intelligence artificielle qui s’articule dans cet article autour de quatre premières facettes. La frontière entre ce qui est ou n’est pas de l’intelligence artificielle n’étant pas nette, NXU travaille également sur une infographie pour quantifier et graduer les différents niveaux d’intelligence artificielle.
1/ Le processus de création :
Commençons par la version historique, celle de Marvin Lee Minsky qui nomma ainsi la branche de recherche naissante sur laquelle il avançait : « la construction de programmes informatiques qui s’adonnent à des tâches qui sont, pour l’instant, accomplies de façon plus satisfaisante par des êtres humains car elles demandent des processus mentaux de haut niveau tels que : l’apprentissage perceptuel, l’organisation de la mémoire et le raisonnement critique ». Ainsi, on peut parler d’IA pour définir le processus de création par l’homme d’automates du traitement de l’information qui dans leur fonctionnement vont être plus performants que des humains. Ces automates, le produit du process, peuvent pour autant n’avoir rien d’intelligent au moment de leur exécution.
2/ L’intelligence perçue :
Le fondateur de l’intelligence artificielle Alan Turing posa, au travers du Jeu de l’imitation, la question pragmatique de la détection/validation de l’intelligence d’un programme. Un ordinateur serait identifié comme intelligent lorsqu’il serait capable de se faire passer pour un humain auprès d’un autre humain. Cette définition à la mise en oeuvre facile s’appuie sur la dimension psychologique du percepteur, avec ses avantages mais aussi tous ses biais cognitifs. Ainsi, chaque personne peut se construire une perception propre d’un programme au travers de sa sensibilité personnelle, de ses motivations, de son atavisme culturel… et surtout du temps et de la richesse de l’interaction qu’elle entretiendra avec le programme. De nombreux jeux et jouets exploitent cette faille perceptive en nourrissant l’imaginaire de leur utilisateur simplement en fournissant un panel de réponse vaste et non déterministe. Ils sont perçus comme intelligents alors qu’il s’agit pour la plupart de réactions tirées au hasard dans une large bibliothèque de comportements prérenseignée.
3/ L’Intelligence une propriété du système :
Les sciences cognitives ont enrichi le débat sur l’intelligence en exposant différentes facettes de l’intelligence qui s’expriment dans le règne vivant comme l’ensemble des processus cognitifs qui permettent à un individu de modifier son comportement face à des changements de son environnement (événements, ou modifications continues). L’intelligence se manifeste par l’acquisition de nouveaux comportements (ou processus cognitifs) par l’apprentissage. En cela l’intelligence devient le pendant comportemental de ce qu’est l’homéostasie à la physiologie : l’ensemble des processus d’adaptation qui permettent de garder le système-organisme dans un état fonctionnel.
Reconnaissance spatiale, reconnaissance de motifs, planification de tâches, imitation, transposition, sont des facettes de l’intelligence aussi bien pour un système naturel qu’artificiel. L’intelligence, étymologiquement la propriété de comprendre le monde environnant, est une capacité active : le système (vivant ou artificiel) que l’on étudie est-il intelligent au moment où on l’observe ? Il a certes appris quelque chose, mais est-il toujours capable d’apprendre ? Le sens commun distingue mal la propriété d’adaptation du fruit de cette adaptation. Certains biologistes pencheront pour définir l’intelligence comme la propriété d’adaptation elle-même. Un réseau de neurones que l’on a conditionné à reconnaître des images est-il intelligent ? Certains biologistes répondront que non car la propriété de reconnaissance visuelle peut-être selon les espèces et selon la tâche plus ou moins innée ou acquise. L’intelligence se manifestera au delà du réflexe ou du conditionnement, lorsque l’individu/système pourra mettre en oeuvre à minima le fruit d’un apprentissage, à fortiori une inférence ou mieux encore un raisonnement déductif.
4/ L’Intelligence si on la laisse s’exprimer :
C’est le dernier pan de notre réflexion sur l’intelligence artificielle : un algorithme si potentiellement intelligent qu’il soit, peut-il être qualifié d’intelligent s’il ne s’exprime que sur des tâches triviales, ou encore dans un environnement simplifié, fermé, voire statique ? Dans le processus d’apprentissage, l’environnement nourrit le système et il se produit un couplage entre le système et l’environnement. Francisco Varela proposa le concept d’énaction pour traduire au sein de ce couplage le fait que le système apprend les propriétés de l’environnement au travers de son interaction avec lui. Ainsi, c’est l’information présente dans l’environnement et la manière dont le système interagit avec elle qui est une des sources de l’intelligence du système.
Les approches compétitives, dites “adversariales” ou l’algorithme apprend à s’améliorer face à lui même présentent ces propriétés de l’intelligence, mais alors que les performances sur un jeu de tic-tac-toe (morpion) ne firent que faible presse, la même performance par un algorithme équivalent sur le jeu de Go fit un buzz à la portée planétaire. Même algorithme et même processus d’apprentissage mais une perception du problème et de sa finalité incomparables, d’autant plus que des cultures très différentes sont touchées… Et pourtant, cet algorithme qui a le plus fait couler d’encre virtuelle sur le web pourrait-il nous aider dans la moindre tâche de notre quotidien ?
Positionner l’intelligence artificielle en regard de l’intelligence naturelle sera toujours problématique. D’innombrables tests existent et sont encore à découvrir pour juger, comparer ou sélectionner des systèmes artificiels selon des critères guidés par l’objectif ou la finalité des concepteurs. En conclusion, définir l’intelligence artificielle, sans la caricaturer, exige de prendre en considération l’ensemble de dimensions propres au système artefactuel (sa mémoire, ses processus d’adaptation…) et l’ensemble des dimensions extrinsèques (son évaluation, l’environnement dans lequel il évolue, son histoire…).
Jean-Pierre Mano, Senior Data Scientist, membre NXU Think Tank
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