Tel le flambeau olympien, celui de lʼinnovation nʼest-il pas fait pour être relayé ?
Nʼest-ce pas cela dʼailleurs le propre et lʼintérêt de lʼinnovation : apporter une solution à la sclérose qui sʼinstalle chez ceux qui sont devenus premiers ?
Le flambeau de lʼinnovation ne bouge-t-il pas en permanence ? Les Européens reprenaient au XVe les avancées faites en Chine en matière dʼimpression. Peut-être que bientôt les Européens sʼinspireront de la technologie 5G Made in China pour passer un cap technologique en termes de qualité, de coût et de sécurité des réseaux ?
Au début du XIXe, les Anglais déposaient un brevet sur une invention de Nicolas Appert, la conserve. Aujourdʼhui les américains reprennent les bonnes idées Invented in Europe. Est-ce une indication que les Européens doivent aussi sʼaméliorer en termes de bonne vieille stratégie de veille commerciale ?
Ce qui mènerait à se poser des questions sur la capacité de vieux continent à générer des entrepreneurs. Quid de notre capacité à donner envie aux nouvelles génération de découvrir cette aventure passionnante (1) ? Trop de centralisation, trop de bureaucratie, trop de planification dans un monde progressivement plus numérique ? Alors que ce monde numérique demande justement de la rapidité dans la décision, de la proximité avec un marché en mutation constante ? On ne planifie pas le numérique comme on planifiait à une époque lʼaéronautique : les échéances sont plus véloces que ces longs cycles de décision. Lʼacronyme VUCA en atteste.
Mais une fois lʼentreprise lancée, se pose la question du financement. Ce sujet longuement évoqué (2) dans un portrait de lʼécosystème toulousain montre que nous devons aussi libérer lʼinvestissement privé, lʼattirer même. Mais le chemin est long, la méfiance grande et les résistances importantes face à une démocratisation de lʼinvestissement entrepreneurial. Comment faire pour bousculer ce paradigme ?
Mais nous devons tester aussi. Pourtant, les entreprises cibles sont frileuses, elles hésitent, elles tergiversent. Ne faudrait-il pas des Crédit Impôt Test pour inciter les cibles à investir de leur temps ? En complément dʼun Small Business Act pour ouvrir les possibilités ?
Certains comme Philippe Méda disent que lʼEurope a perdu la bataille du numérique. Pourtant, est-ce que lʼon ne voit pas apparaître des nouveaux réseaux sociaux tous les ans depuis Six Degrees (déjà dans les années 90), au point quʼun Meta a besoin de racheter Instagram ? Pourquoi est-ce que lʼEurope ne pourrait pas inventer un nouveau réseau social, le faire grandir et prendre sa place à côté des nouveaux Tik Tok et WeChat ?
Les géants ont par définition des pieds dʼargile. Si lʼon rapporte le classement de lʼinnovation au degré dʼincertitude par employé, parions que lʼEurope a de nombreuses pépites (3)! Les technologies de stockage et de traitement des données évoluent en permanence. Mais il faut y croire et se donner les moyens de venir prendre le relai.
Et puis, lʼinnovation dans quoi ? Il nʼy a pas que la technologie dans la vie. Pourquoi pas lʼinnovation dans lʼart culinaire, dans le tourisme, dans lʼoenologie, dans la distraction, et dans lʼart de vivre ? Certes moins scalable, mais souvent très durable et plus agréable.
Aussi, et peut-être surtout, ne faudrait-il pas se donner une nouvelle fraicheur dans le regard, cette capacité à dire « pourquoi pas » et cesser de dire que cʼest impossible ! Ne pouvons-nous pas alors reprendre pour notre propre intérêt la phrase de Mark Twain : « Ils ne savaient pas que cʼétait impossible, alors ils lʼont fait. »
Auteur : Philippe Cartau – Fondateur Cirrus IM – Enseignant ISC Paris – VP NXU Think Tank
(1) Voir lʼexcellent ouvrage de Michel Marchesnay : Entreprendre, Histoires dʼune servitude volontaire
(2) Superposition, lʼInnovation Inspirée de Jeanne dʼArc – Philippe Cartau
(3) Le classement de lʼinnovation peut se multiplier par la capacité de diffusion : degré dʼinnovation par rapport à taille de lʼentreprise.
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